mardi 5 juillet 2011

Le sacrifice du cerisier (conte)

Les légendes et contes impliquant des arbres sont légions, on les retrouvent sous toutes les cultures et sous tous les continents
Ce très joli conte de François Noul à été publié dans le numéro 759 de la revue "Notre Jardin" de juillet - août 2011

A la Sainte Catherine, à la naissance de la Jasmine, son papa a voulu marquer l'événement en plantant pour elle un cerisier dans le coin le plus ensoleillé du jardin.
L'accompagnant dans son travail les merles flutistes et le chat plus agité qu'un chef d'orchestre
La semaine suivante, main dans la main, les parents sont allés saluer l'arbrisseau et lui présenter l'enfant.
Bonté divine, il bourgeonnait.  Un bourgeon, un seul.  Un souffle de vie, fragile encore mais déjà présent comme une promesse.

" Tu vois ma fille, cet arbre papa l'a planté pour toi.  Vous grandirez ensemble.  Tu pourras lui confier tes joies et tes peines.  Il te protégera.
Comme lui garde toujours la tête noyée dans l'infini et les pieds bien ancrés dans la terre de chez nous"

Et puis Jasmine a grandi, avec au fil des saisons des bons moments à savourer et des journées parfois plus pénibles à supporter.
Joyeuse, rêveuse ou triste comme le sont les adolescentes, elle courrait très souvent se réfugier près de son arbre pour lui conter les petits événements de la vie quotidienne.
Et puis, Jasmine posait son oreille contre le tronc pour écouter les remarques et les conseils de son ami.

Un jour de plein été, rouge comme un baiser et toute tremblante Jasmine était venue se blottir contre le tronc du cerisier.

" Toi lui dit l'arbre, tu as un secret à me confier.  Tes joues brûlent et j'entend ton coeur battre jusqu'au plus profond de mes racines..."

" C'est vrai répondit Jasmine.  Hier à l'école, au cours de la récréation, Jean-Louis, un garçon de ma classe a voulu me parler".

" Viens m'a-t-il dit, sous le préau à l'onbre du platane..."

Sans trop savoir pourquoi j'ai déjà rougi, Jean-Louis parle rarement aux filles.
Qu'avait-il donc de si important à me dire?
Et bien voilà, murmura-t-il en ma prenant la main.  J'ai onze ans maintenant, je suis déjà grand et plus tard j'ai envie de me marier avec toi.  Je te le dis maintenant parce que Paul, le fils du boulanger te trouve aussi très jolie.

Mon visage a pris toutes les couleurs de l'arc-en-ciel et mon coeur battait comme un tambour de kermesse.

J'ai essayé de lui parler mais paralysée par l'émotion les mots sont restés enfermés dans ma gorge comme des oiseaux prisonniers.
Et c'est alors qu'il m'a embrassée.  Un petit baiser juste derrière mon oreille.  Là dans mes cheveux.
J'ai senti un frisson comme si mille aiguilles me transperçaient.  Des petites aiguilles.  Et puis il est reparti jouer au foot avec ses copains.  Depuis je pense à lui sans arrêt.

Une année se passa avec ses petits bonheurs et ses problèmes à résoudre.  Puis un jour Jasmine se senti fatiguée.  Elle n'avait plus envie de jouer, s'essoufflant au moindre effort.  Elle mangeait à peine et ses joues avaient perdu leurs belles couleurs.
Cette fatigue quotidienne finit par inquiéter ses parents qui la firent examiner par un médecin.
Par précaution et pour en avoir le coeur net, celui-ci prescrivit une prise de sang et divers examens.
Les analyses révélèrent que l'enfant souffrait d'une affection grave à soigner d'urgence.  Toute la famille était effondrée.  Heureusement Jasmine conservait un bon moral et tentait par tous les moyens de rassurer ses parents.

"Ne te tracasse pas maman, ensemble nous vaincrons cette vilaine maladie..."

Malgré les médicaments, les bons soins et la volonté de guérir, la santé de l'adolescente se dégradait de plus en pls.
Un matin, alors qu'elle se sentait plus lasse et plus déprimée que d'habitude, elle décida d'aller confier ses doutes au cerisier.

"Bonjour mon ami, lui dit-elle.  Excuse moi.  Depuis ma maladie je t'ai un peu abandonné.  La plupart du temps je reste confinée dans ma chambre.
Je me sens si faible...
Si malade et si triste parfois..."

"Je comprends ta détresse, répondit l'arbre tout heureux de revoir l'enfant"

"Toutefois, relié par le fil de l'amitié, je n'ai jamais cessé de penser à toi"

"Fais-moi confiance.  A nous deux nous allons nou battre et faire l'impossible pour que tu guérisses..."

"Je le souhaîte tellement... pour que maman et papa retrouvent le sourire..."

"Alors écoute-moi reprit l'arbre.  Tu viendras ici chaque jour.  Tu poseras ton front contre mon tronc en répétant à trois reprises: Arbre mon ami, insufle-moi un peu de ta force et de ta paix...
Je t'enverrai des ondes telluriques, une transfusion végétale bénéfique..."

Le pacte conclu, Jasmine s'efforçait de quitter sa chambre chaque matin pour rejoindre son ami.  En le prenant dans ses bras, elle récitait la formule cabalistique.
Après quelques semaines de ce traitement étrange, l'état de santé de Jasmine s'était amélioré.  Elle mangeait plus et mieux que jamais, ses joues avaient repris ses bonnes couleurs et miracle, les derniers examens et les prises de sang ne présentaient plus aucune anomalie.
Folle de joie, Jasmine courrut annoncer la bonne nouvelle à son arbre bien aimé.

"Je sais lui dit l'arbre tout frissonnant.  Tu es guérie maintenant.  Complètement guérie... Rien de fâcheux ne peut plus t'arriver..."

"Dis mon arbre, pourquoi trembles-tu et pourquoi perds tu tes feuilles?  Elles sont toutes jaunes et nous sommes en plein été..."
"Ce n'est rien, répondit-il.  L'important c'est que tu aies retrouvé la santé... Adieu Jasmine... Pense souvent à moi.  Tu as été ma meilleure amie et ma plus grande joie.  Je pars heureux car ce que je t'ai donné t'appartient à tout jamais"

Puis l'arbre se tu et son tronc devint tout froid.
Bouleversée Jasmine serra le cerisier dans ses bras en l'embrassant et dans un sanglot lui murmura "Merci mon ami, repose en paix, je ne t'oublierai jamais"

....Et si ce n'étais pas un conte...............

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